Espagne : l’entrepreneuriat innovant comme levier de changement vers plus de bien-être social

Il y a quelques mois, le gouvernement espagnol a approuvé une loi pour soutenir la création et la croissance des entreprises émergentes, la loi sur les startups , avec laquelle il cherche à placer l’Espagne au niveau de ses pays voisins en termes d’attraction de talents, d’investissements et d’entrepreneuriat innovant.

On sait que l’entrepreneuriat innovant, lorsqu’il génère de la valeur économique et sociale, agit comme un levier de changement, qui pousse la société vers des niveaux plus élevés de bien-être . Ainsi, la nouvelle norme a un impact, précisément, sur l’amélioration des conditions de contexte pour encourager l’entrepreneuriat en termes d’innovation et de productivité, et ainsi structurer une société plus entrepreneuriale.

Les pouvoirs publics constituent un élément important dans ce contexte et, en outre, ils ont la capacité d’influencer le comportement des autres acteurs de l’écosystème entrepreneurial.

La loi startup arrive à point nommé , dans une situation post-covid-19 en manque d’illusion et d’ambition pour faire face aux défis fixés par l’Europe et par les Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’Agenda 2030. Ainsi, la loi incarne pour marcher avec l’espoir de revitaliser le tissu commercial espagnol grâce à la création de nouvelles entreprises innovantes et évolutives.

Ce texte juridique se caractérise par :

  • La promotion d’une plus grande collaboration interinstitutionnelle (entre les administrations publiques, les universités, les organismes publics de recherche et les centres technologiques).
  • L’offre d’avantages fiscaux (pour investir, pour attirer les talents).
  • Une plus grande précision pour la définition d’une start-up.

Mesures visant à améliorer l’agilité bureaucratique (facilités télématiques, réduction des coûts administratifs pour la création d’entreprise).

Quinze ans sans pouvoir quitter la vallée

La loi est annoncée après que l’Espagne a traversé une période de décapitalisation des entreprises. Selon des données récentes de l’INE (Institut national de la statistique), la démographie des entreprises espagnoles a récupéré le volume d’entreprises actives qu’elle avait avant la crise financière mondiale de 2008.

La population de 3 422 239 entreprises actives en 2008 est tombée à 3 119 000 entreprises opérationnelles en 2013, entraînant une décapitalisation des entreprises de 9 % au cours de cette période de cinq ans. Depuis lors, il y a eu une reprise progressive pour atteindre un chiffre de 3 430 663 entreprises en activité à la fin de 2021. Cela s’explique principalement par une baisse récente des taux de fermeture d’entreprises et une légère croissance des taux de création de nouvelles entreprises.

Malgré le fait que cette importante reprise du nombre d’entreprises ait eu lieu, il faut préciser que près de deux millions d’entre elles n’emploient aucun salarié, que 83 % emploient deux salariés ou moins et qu’environ la moitié sont contraintes de fermer avant ses cinq premières années d’existence.

Indépendamment de ce panorama, une loi qui contribue à prospérer et à accroître le bien-être des citoyens en développant les conditions du contexte pour améliorer la quantité et la qualité de l’activité entrepreneuriale est toujours la bienvenue.

Les autres entrepreneurs ne peuvent être négligés

Tous les entrepreneurs ne subissent pas les conséquences de la crise de la même manière. Le consortium international Global Entrepreneurship Monitor (GEM) a mis au jour une étude récente qui analyse la situation des femmes entrepreneures dans plus de 50 pays. Deux faits ressortent :

Le rapport souligne que la fermeture d’entreprises chez les femmes résidant dans les pays à revenu intermédiaire supérieur a augmenté de 74 % pendant la période pandémique tandis que, chez les hommes, cette augmentation des fermetures d’entreprises a été de 34 %.

Seules 2,7% des femmes (contre 4,7% des hommes) s’aventurent dans les technologies de l’information et de la communication), un secteur qui attire une grande partie des investissements des business angels (early Investors) et du capital-risque.

Une question d’âge

Dans des pays comme la Corée, Israël ou la Norvège, l’activité entrepreneuriale de la population âgée de plus de 34 ans est supérieure à l’activité entrepreneuriale exprimée par le groupe des moins de 34 ans.

À cet égard, le dernier rapport (2021-2022) de l’Observatoire espagnol de l’entrepreneuriat (rapport GEM Espagne 2021-2022 indique que le pourcentage de la population âgée de 18 à 24 ans qui a été encouragée à entreprendre en Espagne est de 2,9 %, tandis que le pourcentage pour la tranche d’âge 55-64 ans est de 3,9 %.

Ces tendances , en somme, reflètent l’existence de certaines disparités (par sexe et par âge) qui invoquent la nécessité de considérer et de soutenir les groupes sous-représentés ( entrepreneurs manquants ) pour construire un écosystème entrepreneurial plus inclusif. À cela, il faut ajouter une vision plus durable pour aller vers une entreprise transformatrice.

Vers un entrepreneuriat « transformateur »

La loi startup est conçue pour favoriser les conditions de création et de croissance d’entreprises innovantes et évolutives, ce qui se traduira par une augmentation de l’emploi, de la productivité et de la croissance économique.

On ne peut ignorer que les femmes et les seniors entreprennent aussi , générateurs d’emplois, de productivité et de croissance économique.

Un entrepreneuriat inclusif et durable est également possible. Autrement dit, une entreprise transformatrice qui va au-delà de l’optimisation des bénéfices.

Il est encore tôt et il faudra plus de temps pour évaluer les résultats de l’application de cette nouvelle loi, mais en plus de promouvoir l’entrepreneuriat innovant (à des fins de résultats économiques), il faudra à l’avenir observer où ces autres tendances point d’entrepreneuriat transformateur (à des fins d’impact social).

Inaki Peña Legazkue

Professeur, Département d’économie et de finance, Université de Deusto

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