asd

RDC : demander aux casques bleus de faire leurs valises, c’est aboyer et non raisonner (Tribune de Jo Sekimonyo)

Le coup de gueule sur les casques bleus de la MONUSCO en RDC existait déjà sous le mandat de M. Kabila. A son tour, le président Tshisekedi a depuis exprimé le souhait que la mission onusienne quitte le pays, ou du moins que la taille de la force onusienne de maintien de la paix soit réduite. De nos jours, sur cette affaire, du président du sénat aux lycéens, tout le monde se met à beugler.

Même après que le Congo ait accusé le Rwanda voisin de soutenir les rebelles, ce que le Rwanda nie, l’alternative imminente semble être que sept pays du bloc régional de la Communauté de l’Afrique de l’Est déploient des troupes dans l’Est de la RDC. Il y a lieu de croire que cela transformera à son tour cette partie du pays en un champ de la mort puisque chaque voisin s’est attribuer un couloir dans lequel il devra éliminer ses ennemis et rivaux cachés en RDC et tout congolais soupçonnée d’être un trouble-fête et têtu.

Tous les voisins de l’Est de la RDC se frottent les mains sauf la Tanzanie qui s’abstient. Sa foi en ce genre de solution ait été ébranlée par le fait qu’il y a dix ans, sous le drapeau de l’ONU, ses troupes ont chassé les terroristes du M23 de la zone où ils avaient établi leurs fiefs au Nord-Kivu jusqu’à ce qu’ils soient vaincus et aient traversé le Rwanda et l’Ouganda, en une seule journée de bataille, pour les voir réapparaître en RDC aujourd’hui.

Ce qui fait grincer des dents quelqu’un comme moi, un Hutu congolais, n’est le fait que mon grand-père a été tué et enterré dans une fosse commune, une tante et son fils comme tant d’autres ont été massacrés une de ces nuits où le gouvernement tutsi rwandais décidé de « neutraliser » ce qu’il considérait comme une menace potentielle, les Hutus rwandais réfugiés en RDC, et que les Congolais tués soient considérés comme simple fatalité de ce drame importé. Ce n’est pas non plus le fait que plus de 20 ans plus tard, le même argument a prolongé cette solution barbare. Plutôt, ce sont les conséquences économiques et sociales en RDC des rivalités primitives d’un autre pays préférant en découdre sur le sol congolais qui sont incommensurables mais d’une ampleur palpable écœurante.

Faux pas

Il convient de noter que le Conseil de l’ONU a toujours adopté à l’unanimité des résolutions renouvelant le mandat de la MONUSCO en quelque sorte au mépris des requêtes du gouvernement de la RDC. Et maintenant, les citoyens ordinaires ont décidé de descendre dans la rue de la manière la plus dramatique pour exiger que les Casques bleus fassent leurs valises.

C’est fondamentalement aboyer et non pas raisonner. Il faut aussi hurler que majorité n’est pas raison.

L’argument pour expulser les casques bleus a longtemps été que le gouvernement congolais, après des années d’implication de l’ONU et trois élections présidentielles, doit maintenant assumer la pleine « appropriation nationale » du processus de paix et de stabilisation. Les Congolais ne demandent que deux choses : que la MONUSCO parte et que le gouvernement congolais assume ses responsabilités pour instaurer la paix sur tout le territoire. La combinaison dans cette requête est dangereusement drôle.

Il est facile d’être aveuglé par la colère après avoir observé depuis un balcon du centre-ville de Beni alors qu’une unité de maintien de la paix joue les touristes dans des véhicules blindés le long de la partie la plus sûre de la route la partie la plus sûre de la ville et se réveille aux nouvelles que des hommes, des femmes et des enfants ont été coupés avec des machettes pendant la nuit non loin des camps des forces de l’ONU et de l’armée congolaise. C’est ainsi, en particulier dans les moments difficiles, on peut être un héros et avoir tort tandis qu’un autre peut être un méchant et avoir totalement raison. Je choisis inlassablement être ce dernier.

Qu’est-ce que les Congolais reprochent aux casques bleus ?

La guerre et l’insécurité profonde dans l’Est de la RDC ont continué d’être la norme depuis 1996, à un coût horrible pour les populations civiles. Selon une estimation, plus de 5 millions de personnes sont mortes à cause de la guerre et de la violence. L’instabilité et la violence continues ont conduit à un approfondissement de la mission de l’ONU, qui est maintenant la plus grande opération de terrain de l’ONU avec une force globale d’environ 20 000 soldats.

Les missions de maintien de la paix de l’ONU étaient un élément essentiel de la stratégie conjointe visant à désarmer plusieurs dizaines de milices rebelles basées dans l’est du pays, permettant au gouvernement d’assumer l’entière responsabilité de la sécurité dans cette région.

Dans l’ensemble, la situation sécuritaire dans le pays n’est pas aussi bonne qu’elle devrait l’être. Les Congolais accusent la MONUSCO de jouer passivement un rôle de stabilisateur militaire et de protecteur des civils, notamment contre le M23. Il y a suffisamment de contrecoups pour se demander s’il appartient aux forces de l’ONU de faire le tri entre les animosités tribales superflu en RDC et les émois et convoitises régionales moyenâgeux ? évidemment pas. Cependant, l’ONU a en abondance ce dont la RDC a besoin pour le faire. Pas des armes lourdes, mais plutôt de l’argent et de l’expertise pour s’attaquer au vrai problème.

Hurler dans la bonne direction

Je n’ai pas encore compris comment l’arrêt des activités commerciales transformant un centre dynamique comme Goma en une ville fantôme affectera les forces onusiennes en RDC. Toutefois, l’échauffement congolais présente une ouverture pour repenser l’approche de l’instauration de la paix.

La RDC fait partie des cinq pays les plus pauvres du monde, avec environ une personne sur six vivant dans l’extrême pauvreté en Afrique subsaharienne vivant en RDC.

Tous les Congolais en RDC sont confrontés à des obstacles importants aux opportunités économiques et à l’autonomisation. Une plongée dans les régions rurales du pays révèle à quel point la pauvreté primitive est profonde.

L’ONU a prévu de dépenser un milliard de dollars pour le casque bleu pour seulement 2021-2022. L’organisation a des experts à bord qui peuvent enseigner comment construire ou reconstruire une nation, mais les citoyens de cette nation doivent définir la prémisse et le thème.

Les casques bleus devraient certainement retourner dans les trous noirs dont ils sont sortis. Les Congolais devraient descendre dans la rue pour exiger que l’argent destiné à les gâter, qui représente par comparaison un cinquième du budget national congolais, soit utilisé pour lutter contre la pauvreté et améliorer le niveau de vie des populations de la RDC, particulièrement à l’Est, en créant des voies d’accès au crédit financier pour les petits et moyens commerçants et entrepreneurs locaux et à la capacité d’un individu à participer à un dialogue sophistiqué ou à un échange commercial à haute valeur ajoutée, aux programmes énergétiques, de santé et autres et aux personnes qui contribueraient à la modernisation de l’économie et des phantasmes congolais.

Autrement dit, utiliser cette manne financière pour rendre les Congolais en RDC humains, au sens noble contemporain.

Jo M. Sekimonyo

Auteur, théoricien, militant des droits de l’homme et économiste politique

Articles Similaires

- Advertisement -

A La Une