RDC : Ce que François Hollande m’apprend da la communication de la présidence Tshisekedi

J’ai grandi en suivant l’actualité politique internationale, et principalement celle française. J’ai longtemps été séduit par les grandes figures de la droite républicaine de la décennie 2000-2010, à la tête desquelles – à tout seigneur tout honneur – Nicolas Sarkozy.

Mais, j’étais aussi intéressé par une certaine gauche « réaliste », qui comprenait les défis, et qui était « faite pour gouverner », où on pouvait trouver Dominique Strauss-Kahn, Bernard Kouchner et bien d’autres. De personnes comme Royal, Hollande… me laissaient indifférent.

Comme je le disais à mon aîné Maître Gabriel Mbuyi, à la veille du second tour des présidentielles françaises de 2012, je ne voyais pas « un type comme Hollande » diriger la France. A l’époque, il n’aime pas trop « Sarko » (je ne sais pas si cela a depuis changé).

Hollande sera tout de même élu par les Français (pour beaucoup, c’était un vote sanction contre Sarkozy), et bien naturellement la majeure partie des citoyens français ne le trouveront pas à la hauteur de la tâche ; il a été contraint à ne pas « compétiter » pour sa réélection.

Pour moi, Hollande c’était donc un désastre !

Ce n’est que quand, il y a deux ans, j’ai lu « Leçons du pouvoir » que le personnage de Hollande m’a paru intéressant. J’ai senti un homme d’expérience ; expérience de celui qui avait voulu substituer sa « présidence normale » à « hyperprésidence » de Sarkozy. Le sujet était intéressant, en ce qu’il me semblait aborder d’une certaine manière le paradoxe de la communication – ou son essence tout court – de la Présidence, naissante à l’époque, de Felix TSHISEKEDI, qui avait un peu de deux. Je pensais – et pense encore – que notre Président de la République doit éviter le piège de ces deux extrêmes.

Voici quelques beaux extraits (phrases) que j’ai choisis de « Leçons du pouvoir » de François Hollande, paru en 2018 :

1. Le réalisme sans projet est un renoncement mais l’idéal sans action est une abdication.

2. Le président n’est pas seulement chef d’État. Il est le premier citoyen de la nation : il lui doit des comptes. Il est souverain mais il est aussi le sujet du vrai souverain qui est le peuple. S’il est l’un plus que l’autre, il ne manquera pas de dresser l’opinion contre lui. Tout président qui arrive aux responsabilités a sa conception de la fonction. Mon prédécesseur avait joué la carte de l’hyperprésidence, décidant de tout et parfois de rien, aimant la joute, redoutant le calme quitte à provoquer le tumulte. Il avait compris le quinquennat comme une course de vitesse. Chaque jour devait correspondre à un événement, une visite, un discours, une phrase. Il occupait l’espace au risque de sortir du cadre. Il recherchait la controverse. Il s’exposait non sans témérité au point de concentrer sur sa personne tous les sentiments, pas toujours les plus flatteurs. Lors des rares moments où il pensait manquer d’ennemis, il se plaisait à les inventer. Il y parvenait sans peine ; à la fin de son mandat, il les collectionnait.

3. Une présidence « normale » n’est pas une présidence banale.

4. J’ai constaté, parfois à mon détriment, que la transparence loin d’assouvir la curiosité la stimule, et repousse ses limites jusqu’à l’intimité.

5. Pour avoir pris des décisions majeures en cinq ans, celles qui ont déterminé notre sécurité ou notre avenir et tant de fois modifié le destin de mes compatriotes, je tire de cette expérience une double leçon. La première vaut pour le chef d’État. S’il veut rester au niveau qu’exige sa responsabilité, il ne doit pas être submergé par le nombre de dossiers qui remontent vers lui. Ils envahissent son temps, captent son attention, et altèrent sa vision de l’essentiel. Tout ne se vaut pas dans l’agenda présidentiel, une nomination ou une opération extérieure, un arbitrage budgétaire ou la fixation d’un cap stratégique, l’annonce d’une réforme ou sa mise en œuvre. À vouloir intervenir sur tout, on ne pèse sur rien.

La seconde leçon vaut pour l’histoire. L’anecdote a supplanté le sens, l’écume est regardée comme la mer. Or dans une action, c’est la trace qu’elle laisse qui juge sa profondeur. Ce n’est pas le temps passé à une décision qui compte. C’est la durée qu’elle aura pour le bien commun.

6. Il y a une politesse à ne pas gémir quand c’est votre interlocuteur, bien plus que vous, qui est en droit de le faire.

7. Il ne faut jamais rien laisser sans réponse, surtout quand il s’agit de médiocrité. On ne s’y abaisse point. On s’en délivre.

8. Dans une négociation, la méthode compte autant que le but. Pour arriver à ses fins, la première qualité c’est la patience. Savoir utiliser le temps, l’étirer si nécessaire, accepter les coupures, éviter les ruptures. Si la discussion s’enlise, c’est bon signe. Tant que les protagonistes restent autour de la table, rien n’est perdu. Les nuits ne portent pas seulement conseil. Elles accouchent des bons accords. Rarement les participants acceptent de les avoir sacrifiées pour rien. Le petit matin fait partie du cérémonial. Les yeux tirés sont souvent ceux du vainqueur. Il ne suffit pas d’avoir raison pour convaincre ni d’avoir de la prétention pour séduire. L’intelligence tactique, c’est une course de haies.

Franchir l’une après l’autre, c’est la meilleure façon d’intéresser chaque interlocuteur à la réussite commune.

Enfin, et à l’inverse, face au cynisme, au mensonge, à la violation du droit, la négociation tourne au piège. La discussion se change en renoncement, l’accord en capitulation.

9. Parler n’est pas communiquer. Réagir aux questions n’est pas apporter les réponses.

Être dans l’actualité n’est pas être dans la vie. Aborder tous les thèmes, c’est n’en imposer aucun.

10. À s’inviter en permanence chez les gens, ils finissent par vous fermer leur porte. À vous voir, ils ne vous regardent plus. À saturer l’espace, ils vous effacent. À leur annoncer chaque jour une initiative, ils ont déjà oublié la dernière.

11. C’est la différence entre donner du sens et faire du bruit.

12. La compassion n’est pas le contraire de l’autorité. Elle en est le corollaire.

13. En politique, il est irrationnel de ne pas tenir compte de l’irrationnel.

Les convictions doivent prévaloir là où seule la volonté compte et où aucune contrainte économique ou financière et encore moins extérieure, ne nous empêche d’agir. A être très raisonnable, on ne fait pas toujours avancer la raison.

14. Les spéculations tactiques font parfois bon marché des différences idéologiques. Il est des circonstances où l’ambition fait taire, pour un temps, les convictions les plus affirmées.

Prince Lukeka

Analyste Politique

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