RDC : un conflit militaire doit être résolu entre les belligérants, et non par leurs alliés

On continue à planter les racines d’un conflit interminable entre la RDC et le Rwanda à cause de maladresse du gouvernement congolais constamment piégé.

Comme par le passé, l’Afrique essaie encore d’aider la RDC à résoudre son problème d’insécurité dans sa partie orientale sans que celle-ci s’attaque réellement aux causes du conflit.

Tenez:

En 2002, l’accord global et inclusif fut conclu entre la RDC et les principaux groupes rebelles dont le RCD-GOMA, qui avait pris le contrôle entier de la partie Est, allant de l’Ituri jusqu’au Tanganyika, partie abritant aussi les adversaires du régime de Kigali.

Le Pays s’était soudainement retrouvé en guerre parce que le Rwanda a maintenu une partie de ses troupes sur le territoire congolais dont il s’était servi pour déstabiliser l’Est du Pays, visiblement pour des raisons ocultees derrière une prétendue persécution du peuple tutsi congolais et la présence de réfugiés congolais sur son territoire. C’est le CNDP qui revendique à la place du Rwanda.

En 2009, un accord est trouvé entre le CNDP et le Gouvernement congolais. Là encore, les mêmes motifs sont utilisés par le Rwanda qui de nouveau envahit la RDC qu’il accuse à nouveau d’entretenir les ennemis de Kigali (FDLR) alors qu’en décembre 2008, il lui avait été autorisé d’entrer officiellement en RDC pour traquer ses ennemis et le neutraliser ou les rapatrier de force chez-eux sous l’opération UMOJA WETU mais ce dernier n’a pu réussir à capturer un seul hormis quelques redditions sporadiques de vieillards anciennement ex-FAR

Lorsque le M-23 voit le jour, ce n’était ni à l’initiative de ses animateurs d’avant ou actuels, c’était à l’initiative du Rwanda parce que le retrait du Sud Kivu de Sultani MAKENGA qui est passé par le Rwanda avait été ordonné par James KABAREBE et c’est auprès de qui cet officier a reçu les instructions pour lancer sa rébellion au Nord Kivu.

Les évènements qui s’en étaient suivis ont démontré que c’est bien  le gouvernement rwandais qui était à la manœuvre parce qu’à la prise de la ville de Goma en décembre 2012, la Police rwandaise s’est déployée dans la ville pour réguler la circulation et assurer la sécurité de certains endroits stratégiques de la ville.

C’est encore à l’initiative de l’Union africaine et les Nations-Unies que le M-23 va se retirer de la ville de Goma en échange d’une négociation qui prendra toute une année à Campala sans issue parce que Kinshasa s’était retrouvé en face d’une délégation composée de congolais porteurs de revendications rwandaises et par défaut de qualité, aucun de délégués présent ne pouvait décider. C’est dans ce contexte que l’Union Africaine avait décidé d’envoyer une Brigade spéciale d’intervention au Nord Kivu pour démanteler cette rebellion et plier Kigali militairement, c’est ainsi que le M-23 a été défait à Bunagana et chassé jusqu’en Ouganda où il va s’ auto dissoudre pour être ressuscité 9 ans plus tard par le régime actuel à Kinshasa.

Parce qu’il me fallait d’abord circonscrire les faits dans l’histoire afin de faire comprendre à l’opinion publique ce qui ne va pas et pourquoi le processus actuel, dit feuille de route de Luanda tend à reproduire la même chose, je reviens maintenant sur le dossier.

Kinshasa, quoique nourrit par les évènements historiques qui ont émaillé les deux dernières décennies, ne parvient pas à situer le problème et le poser sur la table de manière précise pour permettre aux facilitateurs d’identifier les solutions adéquates.

Comme je l’ai souligné, pour résoudre un conflit militaire, il faut l’existence de deux belligerents. Or, à ce stade du conflit, min PAYS ne connait pas son vrai belligerent. D’où la question de savoir:

1. La RDC est en guerre contre qui? C’est qui le belligerent de la RDC ?

D’aucuns dira que c’est le Rwanda. Or en matière de conflits armés, on ne peut désigner son ennemi (belligent) que sous certaines conditions.

– L’ennemi doit avoir déclaré ouvertement la guerre(s’il s’agit d’un état)

– L’ennemi doit avoir engagé de manière officielle et directe son armée pour attaquer son ennemi déclaré,

– Les motifs (causes) de l’entrée en guerre doivent être explicites et clairs,

– Les voies politiques et diplomatiques doivent avoir été employées et épuisées sans trouver une solution pacifique

– L’état déclaré ennemi ne doit pas se retrouver derrière un quelconque supplétif national pour mener sa guerre.

Pour le cas de l’insécurité en RDC, aucune de ces conditions n’est remplie, pourtant il y a une guerre en cours.

2. Que revendique le belligerent en guerre contre la RDC ?

Là aussi, bien que le belligerent ne soit formellement identifié, il se pose un problème d’authentification des demandes et des revendications à la base du déclenchement des hostilités.

D’une part, on croirait à l’expression des frustrations et de mécontentements de certains citoyens congolais regroupés au sein d’une milice armée qui a besoin d’une intégration dans les structures de l’état, et d’autre part encore, on croirait bien sûr à un groupe de marionnettes congolais montés pour besoin de la cause et porteurs des revendications étrangères n’ayant aucun lien avec l’intérêt national.

Face à toutes ces réalités, la RDC a fait un choix périlleux en exigeant de dialoguer avec le Rwanda qu’elle désigné abusivement comme Pays agresseur, sans l’identifier formellement comme belligerent, ce qui complique tout.

Si c’est le Rwanda qui est vraiment désigné belligerent, plusieurs questions resteront ici sans réponse et la RDC ne s’en sortira pas en réalité. Et pour cela, faudra-t-il expliquer à l’opinion :

1. En sa qualité de belligerent déclaré, que demande le Rwanda au gouvernement congolais ?

2. Le Pays est-il prêt ou disposé à répondre favorablement aux revendications du Rwanda?

3. Au cas où les réponses satisfaisantes sont données au belligerent déclaré, que devient le M-23, l’AFC, partiront-ils tous au Rwanda? Deviendront-ils Rwandais pour avoir pris faits et causes pour cette nation contre la RDC ?

4. L’entente entre la RDC et son belligerent déclaré met-elle fin à la guerre?

En réalité, la RDC dans la forme actuelle du conflit aura fait un choix hasardeux et de haute facture pour la nation raison pour laquelle, chaque analyse tendra à conclure que nous sommes très loin d’arriver à une solution durable pour cette guerre.

Au contraire, parce qu’aucune raison objective ne permette d’ériger le Rwanda en belligerent, la RDC, si elle voulait bien recouvrer l’intégralité de son territoire et mettre un terme au conflit actuel devrait soit vaincre militairement l’AFC/M-23 ou carrément dialoguer avec ces derniers au cas où l’option militaire devenait improductive. Sinon à l’état actuel de chose, en dialoguant avec le Rwanda sans inclure l’AFC/M-23 comme co-belligerent, Kinshasa est sur le point d’hypothéquer définitivement la partie conquise par l’AFC/M-23 car, l’histoire de deux dernières décennies indique clairement les ambitions expansionnistes du Rwanda et son intention à maintenir l’Est sous son emprise ou à le couper carrément de la RDC et depuis lors, il avance ses pions lentement tout en fatiguant les populations de l’Est afin de les amener à adhérer à son projet.

C’est pourquoi, tout expert en conflits armés demandera à Kinshasa d’identifier clairement son belligerent afin de dialoguer ou de l’affronter militairement et rétablir la souveraineté de la RDC sur l’ensemble de son territoire dans les frontières héritées de la colonisation, sinon, la forme actuelle du conflit milite au désavantage de la RDC et surtout contre les populations des zones conquises.

Christian Kul. Malaika

Analyste politique et militant des droits de l’homme

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