La République démocratique du Congo (RDC) illustre bien le fait que le potentiel biophysique à n’est pas la même chose que le potentiel économique. La RDC est un pays avec une superficie de 2 345 095 km2, 80 millions d’hectares de terres arables, 145 millions d’hectares de forêts, des ressources minérales abondantes (plus de 1 100 répertoriées), des ressources importantes en eau et en énergie (hydroélectricité, énergies renouvelables, biocarburants, …) un climat favorable à l’agriculture et une population estimée à 77 millions d’habitants, la République démocratique du Congo (RDC) a le potentiel de devenir l’une des économies les plus riches du continent Africain et un moteur de croissance africaine si elle peut surmonter certaines contraintes structurelles. Au lieu de cela, le pays figure toujours parmi les pays les moins avancés.
Des décennies de conflits, de corruption et de mauvaise gestion économique ont gravement affaibli la base socio-économique du pays. Entre 1960 et 2001, la RDC a connu le plus grand déclin économique au monde (moins de -3% de croissance du PIB par an), et le vaste secteur agricole – qui emploie plus des trois quarts de la population – a particulièrement souffert. Les exportations agricoles sont passées de 40 % de toutes les exportations en 1960 à seulement 10 % en 2000, et l’excédent alimentaire par personne a diminué de 30 % entre 1975 et 2000. Environ deux tiers de la population du pays vivent avec moins de 1 dollar par jour par personne, au moins 70 % sont confrontés à une insécurité alimentaire d’une forme ou d’une autre, 16 millions de personnes souffrent de malnutrition chronique, les rendements des cultures ne représentent qu’une infime fraction de leur potentiel, le pays importe environ un quart de sa consommation de céréales. Alors que la population de la RDC représente environ 1% de la population mondiale, le pays abrite 7,2% et 14,3% de la population mondiale et de l’Afrique subsaharienne vivant dans l’extrême pauvreté. Si la RDC continue sur sa voie actuelle, un Congolais sur deux vivra encore dans l’extrême pauvreté d’ici 2030. La mauvaise gestion économique aggravée par les crises politiques répétées a limité le développement économique et piégé une grande partie de la population dans une pauvreté persistante. La fiscalité arbitraire, la médiocrité des infrastructures, l’application marginale des droits de propriété et la faiblesse de l’état de droit ont poussé de nombreuses personnes et entreprises vers le secteur informel, qui représente plus de 80 % de l’activité économique.
Beaucoup plus récemment, la croissance économique de la RDC a ralenti, passant de son niveau d’avant la COVID de 4,4 % en 2019 à environ 0,8 % en 2020. Comme depuis des années, la croissance est tirée par le secteur extractif qui, aidé par la forte demande de la Chine, a progressé de 6,9% en 2020 (contre 1% en 2019). Dans le même temps, les secteurs non miniers se sont contractés de 1,6% (contre une croissance de 5,7% en 2019) en raison des restrictions de mobilité liées à la pandémie, de l’affaiblissement des activités commerciales et de la limitation des dépenses publiques. La consommation privée et l’investissement public ont diminué en 2020 d’environ 1,0 % et 10,2 %, respectivement. Le déficit de la balance courante s’est creusé pour atteindre 4,0 % du produit intérieur brut (PIB) en 2020 et n’a été que partiellement financé par les entrées de capitaux, ce qui a entraîné une diminution des réserves internationales.
D’après les projections du FMI (voir carte ci-dessous), la RDC va réaliser un taux de croissance de 6,4% en 2022, la situation dans le club des pays a croissance rapide. Certes, il y a des raisons pour célébrer une telle croissance ! Seulement, nous devons regarder au-delà du chiffre car nous avons depuis longtemps maintenant que la qualité de la croissance vaut nettement mieux que sa quantité. Ce n’est pas la première fois que le pays réalise ce gendre de taux (voir graphique 1 ci-dessous). Non seulement le pays n’a jamais su maintenir ces performances sur une longue période, car dépendant de la conjoncture internationale, mais surtout essentiellement tirée par l’industrie extractive. Donc, il incombe aux congolais de trouver des stratégies pour générer une croissance qui réduit la pauvreté et garantisse au plus grand nombre l’accès aux biens et services de base de manière durable.
Sur le plan social, le pays se classe au 175e rang sur 189 pays selon l’indice de développement humain 2020 (IDH), bien que certains indicateurs de l’IDH se soient légèrement améliorés de 2018 à 2020. L’indice du capital humain de la RDC est de 0,37%, inférieur à la moyenne de l’Afrique au Sud du Sahara qui est de 4,0. Cela signifie qu’un enfant né en RDC aujourd’hui sera 37% aussi productif à l’âge adulte qu’il pourrait l’être s’il jouissait d’une éducation complète et d’une pleine santé dans ses premières années. En moyenne, un enfant congolais reçoit 9,1 ans de scolarité, ce qui se traduit par 4,5 années d’années scolaires ajustées à l’apprentissage. Par rapport à l’alimentation, 43 % des enfants souffrent de malnutrition. Ce qui met en danger non seulement leurs immunités sanitaires, mais aussi leur capacite cognitive.
D’après l’enquête par grappe a indicateurs des Objectifs de Développement Durables (ODD) menée par le ministère du plan en 2020, l’incidence de la pauvreté monétaire en RDC évaluée à partir du seuil national est estimée à 56,2% avec des disparités selon le sexe du chef de ménage, le milieu de résidence et les provinces du pays. Le rapport estime à 57,1% la proportion de la population vivant en-dessous du seuil national de pauvreté dans les ménages dirigés par des hommes contre 52,8% dans les ménages dirigés par des femmes. Par ailleurs, les résultats ont mis en exergue la persistance de la pauvreté monétaire dans le milieu rural. Un peu plus de huit personnes sur dix (84,9%) vivant dans le milieu rural sont considérées comme pauvre contre 62,6% dans le milieu urbain.
C’est dans ce contexte qu’il est indispensable de mettre en place une initiative holistique et ambitieuse pour ouvrir la voie au développement durable et briser le cycle de la pauvreté persistante en RDC. Dans son discours devant le Congrès le 14 décembre 2019, S.E. le Président Félix Tshisekedi a annoncé le lancement imminent d’un programme de zones économiques spéciales (ZES) pour sur l’ensemble du pays. Cette volonté a été confirmée par la décision la décision de la 56e réunion du conseil des ministres de créer une zone économique spéciale pour la partie Est de la RDC.
Dans cet article, nous essayons d’explorer les conditions de réussite d’une telle initiative y compris la question de son financement ainsi que sa gouvernance. L’objectif principal de cet article est de permettre à l’ensemble des congolais de participer de manière éduquée et réfléchie au débat autour d’une initiative qui a le potentiel de transformer la trajectoire de développement du pays sur plusieurs décennies.
Pourquoi la stratégie des zones économiques spéciales ?
Une zone économique spéciale, est une zone géographiquement délimitée dans laquelle les règles d’affaires sont différentes de celles qui prévalent sur le territoire national, et qui offre des avantages aux investisseurs en termes d’infrastructures, de régimes réglementaires spéciaux et d’une gamme d’incitations fiscales. Le programme des ZES vise à attirer l’investissement direct étranger (IDE) pour accroître l’investissement au niveau de l’entreprise et améliorer la productivité au niveau de l’entreprise en améliorant la coordination, les réseaux et l’innovation au niveau de l’entreprise ;
Dans une zone économique spéciale (ZES), un gouvernement crée des exceptions à ses propres règles – un refuge choisi par rapport au statu quo qui prévaut ailleurs sur le territoire national. L’objectif, selon la Banque mondiale, est de créer un « environnement des affaires qui se veut plus libéral d’un point de vue politique et plus efficace d’un point de vue administratif que celui du territoire national ».
Apres l’échec de l’initiative lancée en 1934, les États-Unis ont de nouveau stimulé les ZES en 1948, lorsque l’opération Bootstrap a fait de Porto Rico une zone de libre-échange pour les entreprises américaines engagées non seulement dans le commerce, l’objectif traditionnel des zones franches, mais aussi dans la production.
L’État-nation le plus peuplé d’aujourd’hui, la Chine, s’est avéré particulièrement prolifique, passant de 0 zone spéciale en 1980 à au moins 295 aujourd’hui. Environ 75 % des pays du monde abritent désormais des ZES, qui sont au moins 4 000 et peut-être près de 10 000.
Figure 1 : Example des ZES en Chine
Figure 2 : Example des ZES en Russie
Il existe un consensus sur le fait que les entreprises qui font partie d’une grappe géographiquement définie bénéficient du fait de faire partie de cette grappe et que ces avantages se traduisent par une croissance de la production économique et du bien-être de la population de la région. Ces avantages découlent de la colocalisation ou de la proximité géographique qui, à son tour, réduit les coûts des intrants pour les entreprises grâce aux économies d’agglomération et facilite les retombées des connaissances qui produisent de l’innovation et une productivité accrue. Par conséquent, les entreprises des grappes qui génèrent ces avantages seront plus concurrentielles, et les régions ayant des grappes performantes connaîtront une plus grande croissance. Dans l’ensemble, les zones économiques spéciales (ZES) qui ont propulsé la transformation économique en Asie de l’Est, en particulier en Chine, ont le potentiel de contribuer i) au transfert de technologie aux entreprises locales le long des chaînes de valeur; ii) au transfert de compétences et de connaissances dans l’économie rurale par le biais de formations professionnelles et professionnelles; iii) au développement de l’économie rurale non agricole déclenché par l’amélioration des infrastructures; iv) a la mise en œuvre de nouvelles politiques ou d’introduire des réformes qui auraient été autrement impossibles.
En général, les ZES ont pour rôle de : (a) concentrer les ressources rares pour fournir aux entreprises/secteurs prioritaires des infrastructures et des services publics de haute qualité ; (b) encourager le regroupement d’entreprises pour débloquer des économies d’échelle et de gamme, des externalités d’agglomération positives et des liens industriels ; et (c) permettre l’intégration des petites et moyennes entreprises locales, ainsi que des zones de production environnantes pour assurer des intrants fiables ainsi que des liaisons en aval avec le marché.
La réussite des ZES est déterminée par : (a) la sélection d’un site offrant un titre juridique clair et peu ou pas le déplacement de population pour minimiser les coûts de transaction et l’incertitude ; des caractéristiques physiques favorables avec des contraintes environnementales minimales (par exemple, les inondations, les rivières) et un impact environnemental minimal (par exemple, la qualité de l’eau, la biodiversité, la qualité de l’air); la proximité de la zone proposée avec les infrastructures publiques existantes afin de minimiser les dépenses publiques de développement des infrastructures hors site ; et la sélection d’un site qui a un potentiel d’expansion physique, sans empiètement vis-à-vis des centres urbains ou des communautés tribales ; (b) la construction de la ZES à proximité des centres de population existants, des réseaux de transport nationaux/internationaux et des groupements d’entreprises pour faciliter l’accès aux marchés de la main-d’œuvre, des matières premières, des fournisseurs et de la distribution ; (c) l’existence de plans d’occupation des sols conformes aux meilleures pratiques d’urbanisme en matière de densité de population et de zones tampons à usage mixte qui séparent le parc industriel, les zones commerciales et résidentielles ; (d) construction publique/privée d’infrastructures (par exemple, égouts/usines de traitement des eaux usées), y compris les infrastructures sociales (en particulier l’éducation et les soins de santé) pour attirer des travailleurs qualifiés ; mise en œuvre de technologies de protection de l’environnement (par exemple, zones de stockage/d’incinération); et mise à disposition de capacités d’élimination/collecte des ordures ; e) un cadre juridique, réglementaire et institutionnel efficace et transparent pour garantir la qualité de l’environnement des affaires à l’intérieur des zones, y compris la fourniture d’infrastructures et la capacité de facilitation des échanges ; et (f) l’existence de zones gérées par le secteur privé pour accroître l’efficacité administrative, opérationnelle et de gestion et réduire les coûts par rapport aux homologues du secteur public.
En outre, les conditions transversales suivantes doivent être réunies :
• Leadership politique soutenu de haut niveau et mécanismes efficaces de coordination et de mise en œuvre : les ZES sont des projets complexes à long terme qui nécessitent une continuité stratégique et politique et un alignement entre – et des contributions de – de nombreuses parties prenantes, y compris des organismes gouvernementaux, des financiers, des acteurs du secteur privé, des acteurs civils. Les organisations de la société civile et les sympathisants externes. De nombreux ZES déraillent ou sont retardés en raison d’incitations mal alignées et d’un échec à fournir une infrastructure et des services coordonnés ou à appliquer des incitations et des réglementations requises. J’y reviens plus en détail plus bas.
• Continuité, cohérence, transparence et prévisibilité des politiques : ces éléments sont essentiels pour une mise en œuvre durable, la confiance des investisseurs, un large soutien politique et un alignement autour de priorités claires
• Intégrer les ZES dans des stratégies de développement plus larges : pour que les ZES aient les impacts souhaités sur le développement, ils doivent également être intégrés dans les stratégies nationales de développement économique, les plans de développement urbain, les réseaux d’infrastructures régionales et les stratégies de développement des secteurs porteurs tels que l’agriculture.
• Recherche préliminaire : une recherche de haute qualité – y compris des analyses de la demande et de l’offre de matières premières et des évaluations de la compétitivité – est cruciale, premièrement pour déterminer si une ZES est la meilleure stratégie et deuxièmement pour guider la sélection du site, les arrangements institutionnels, le ciblage de la chaîne de valeur, l’infrastructure, prestation de services et autres éléments de conception.
• Mobilisation de capitaux à long terme : les ZES sont des projets à forte intensité de capital, et nécessitent généralement au moins 10 ans pour être pleinement établis et générer des revenus publics et privés importants. Ils ont donc besoin de capitaux à long terme souvent indisponibles. En particulier dans les premières étapes, des fonds publics à grande échelle doivent généralement être mobilisés pour financer l’ensemble du projet, cofinancer le projet via un partenariat public-privé (PPP) ou réduire les risques ou garantir les dispositifs de financement privés.
• Obtenir les bons arrangements institutionnels : Il existe un consensus croissant sur le fait que les ZES gérées et exploitées par le gouvernement ont tendance à échouer ou à sous-performer le plus souvent, mais l’exploitation par le secteur privé n’est pas une garantie de succès non plus et il existe de nombreux exemples de ZES exploitées par le secteur privé qui n’arrivent pas à attirer des entreprises ou des entreprises locataires pour obtenir des résultats en matière de développement. Cela suggère que les résultats ne sont pas tant déterminés par qui possède et gère une ZES, mais par la manière dont il le gère : ses objectifs, ses incitations et sa capacité.
• Appliquer une approche progressive au dimensionnement des ZES et au nombre de ZES aménagées : les gens se trompent souvent sur le dimensionnement des ZES, avec des conséquences néfastes ; ils devraient commencer modestement et planifier leur expansion en fonction de la demande. Les parcs trop petits peuvent ne pas atteindre les économies d’échelle requises ou avoir l’impact souhaité sur l’économie locale, tout en étant potentiellement confrontés à des problèmes de congestion et d’élimination des déchets et à des tensions entre les locataires existants et potentiels pour l’espace. Les parcs trop grands, en revanche, risquent de ne pas se remplir et de créer des conflits avec les communautés environnantes. Il en va de même pour le programme AIP dans son ensemble : une recommandation commune consiste à commencer par un ou deux parcs pilotes pour prouver le concept et créer une dynamique avant de procéder par étapes progressives pour étendre le programme.
• Flexibilité et réactivité : En raison de leur nature complexe et à long terme, les performances de ZES dépend de la capacité des gouvernements, des opérateurs et des entreprises locataires à surveiller efficacement les performances et à réagir de manière dynamique aux réalités économiques changeantes.
Importance de la gouvernance et leadership politiques
La leçon la plus importante tirée des expériences antérieures concerne, d’abord et avant tout, l’importance d’un leadership engagé et la volonté politique de s’approprier, de défendre et de conduire le processus (c’est-à-dire la planification et l’exécution d’une ZES) au plus haut niveau. À cette exigence clé s’ajoutent des questions de gouvernance qui s’étendent à la qualité de la bureaucratie en termes de compétence, d’efficacité et de moralité. La capacité du gouvernement à développer et à exécuter avec succès des projets de type ZES, en particulier en partenariat avec le secteur privé, y compris les investisseurs étrangers, dépendra de manière cruciale de l’existence et de la pertinence des instruments juridiques et des arrangements institutionnels en vigueur pour réglementer les négociations et la mise en œuvre des ZES.
On ne saurait trop insister sur l’importance du leadership et de la volonté politique pour propulser la transformation économique, car ils constituent des facteurs de performance en ce qui concerne les questions politiques clés et les facteurs institutionnels qui sous-tendent l’encrage des ZES aux stratégies de développement aux niveaux national et provincial. D’après les différentes études de cas, cet important critère à multiples facettes qui correspond au rôle vital de l’État est, peut-être, mieux illustré par l’Éthiopie, où la responsabilité globale de la supervision des parcs agro-industriels intégrés (PEI) est située dans le bureau du Premier ministre et soutenue par un groupe de travail interministériel de haut niveau qui coordonne avec les quatre parcs industriels régionaux développement et les sociétés pour échanger sur les activités de la ZES et les mises à jour sur les progrès. Le Gabon, où le gouvernement a également pu utiliser son rôle d’allocation des ressources pour mobiliser d’importantes ressources pétrolières afin de s’associer à des investisseurs multinationaux spécialisés afin d’établir une ZES de classe mondiale pour les produits du bois à valeur ajoutée provenant de ses ressources forestières. De même, dans le cas du secteur de la pêche au Sénégal, la désignation de la responsabilité globale et la coordination institutionnelle des activités dans le secteur à un ministère distinct et puissant de la Pêche et de l’Économie maritime, chargé de signer des accords de coopération avec des partenaires étrangers de développement et d’investissement au nom de l’État et qui a joué un rôle déterminant dans la réussite du secteur en termes d’impact sur le développement.
Un engagement fort et à long terme de la part de l’échelon supérieur des élites politiques et des « champions » au plus haut niveau du gouvernement est nécessaire pour s’engager avec les investisseurs privés à des conditions bénéfiques et pour assurer la cohérence des politiques en ce qui concerne la provision d’incitations, y compris la facilité de faire des affaires et la fourniture de divers biens publics et le suivi des résultats des investissements réalisés.
Finalement, il est important d’établir des mécanismes de coordination et de coopération appropriés entre les différents niveaux de gouvernement et entre les différents ministères et organismes gouvernementaux.
Nécessité de créer des fonds spéciaux pour le développement des ZES
Alors que les premiers fonds souverains remontent au XIXe siècle, la vague moderne de fonds n’a cessé de croître au cours des 50 à 60 dernières années grâce à un boom des matières premières dans des endroits tels que le Moyen-Orient, la Norvège et bien d’autres. Dans les premières années, un certain nombre d’idées mal interprétées se sont formées autour du rôle des fonds souverains, les critiques les annonçant comme des barbares à la porte, cherchant à acheter les actifs stratégiques des autres. Cependant, à la suite de la crise financière mondiale de 2008-09, les fonds souverains sont soudainement devenus très demandés en raison de leur fourniture de capitaux à long terme pour toutes sortes d’industries et de secteurs dans la plupart des pays. Il y a également eu beaucoup plus de connaissances et de compréhension créées entre les pays hôtes et bénéficiaires du capital des fonds souverains, en grande partie grâce à la création des pratiques et principes généralement convenus – principes de Santiago pour le comportement d’investissement des fonds souverains.
Le terme « fonds souverain » est généralement connu pour désigner un ensemble d’actifs financiers appartenant à l’État qui sont gérés (investis) à des fins économiques spécifiques. Ces objectifs économiques entrent généralement dans un certain nombre de catégories spécifiques qui ont un impact et affectent le comportement d’investissement des organisations. Il y a plusieurs types de fonds souverain.
Fonds de stabilisation. En général créés dans le but d’aider à équilibrer les positions budgétaires à court terme d’un gouvernement. Ils sont conçus pour protéger le budget et l’économie contre la volatilité – généralement les fluctuations des prix des produits de base – et constituent un outil politique supplémentaire pour respecter les paiements gouvernementaux et les engagements de change dans les pays dont les marchés des capitaux et/ou les monnaies fixes sont moins développés. Par exemple, lorsque les prix des produits de base sont bas, les réserves s’écoulent et sont utilisées pour stabiliser le budget, protégeant ainsi contre les déficits. Lorsque les prix sont élevés, les réserves excédentaires affluent dans le fonds. Il existe des exemples de fonds de stabilisation au Botswana, au Chili, au Mexique, en Russie et ailleurs.
Fonds d’épargne ou de réserve. Ils sont constitués dans le but d’investir les réserves excédentaires au profit des générations futures. La source des réserves provient généralement des mannes actuelles des produits de base. Il existe certains fonds d’investissement de réserve qui sont utilisés pour compléter les réserves de change et gérés par la banque centrale d’un pays. L’objectif ici est d’investir les réserves excédentaires dans des actifs un peu plus risqués pour aider à renforcer les rendements.
Réserves de retraite ou fonds « tampons ». Ce sont des excédents d’épargne qui seront utilisés à des fins précises à l’avenir. Les fonds proviennent de recettes exceptionnelles de produits de base ou de l’assiette fiscale actuelle d’un pays dans le but de prévoir des engagements de retraite conditionnels et non spécifiés dans un bilan public provenant de sources autres que les cotisations de retraite individuelles . Il y a une différence entre un fonds de réserve des pensions et un fonds de pension du gouvernement en ce sens que les passifs des fonds de réserve sont versés directement au gouvernement et que le gouvernement utilise le fonds pour compenser les lacunes du système de retraite. Dans le cas d’un fonds de pension gouvernemental, le flux de passif est versé directement aux personnes qui y contribuent. Il existe des exemples de fonds de réserve de pension en Australie et en Nouvelle-Zélande. Il n’y aura peut-être pas de responsabilité explicite pour ces fonds, mais il y aura un but spécifique à leur développement. Dans le cas de la Nouvelle-Zélande, il s’agit d’alléger le fardeau fiscal futur de fournir un revenu de retraite en raison du profil démographique vieillissant du pays.
Fonds de développement. Ils sont créés avec pour objectif principal de financer des projets socio-économiques ou d’investir dans des secteurs spécifiques dans un pays. La mission des fonds de développement est généralement de soutenir les industries nationales tout en attirant potentiellement les capitaux des investisseurs institutionnels étrangers. Les fonds de développement ont également été qualifiés de « fonds d’investissement stratégique ». Ce sont ce genre de fonds qui peuvent soutenir le développement des ZES en RDC.
Nécessité d’établir une plateforme de connaissances
Le pays devra établir un système d’information numérique interactif pour les décideurs, les analystes et les autres parties prenantes. L’objectif de ce système est de soutenir la planification et la mise en œuvre de politiques fondées sur des données probantes, ainsi que des processus inclusifs d’examen et d’apprentissage des politiques en fournissant un environnement de données en ligne, hautement interactif et dynamique, riche en outils de prétraitement standard et d’analyse de données essentielles, rassemblant en une seule ressource les données d’une variété de domaines nécessaires pour une conception et un ciblage efficaces des politiques. Un tel système garantira un large accès à des données désagrégées de haute qualité dans tous les secteurs, zones administratives, couches sociales et agroécologies afin de faciliter des processus d’examen et de dialogue inclusifs. Il devra également offrir un ensemble de capacités en ligne pour la visualisation et l’exploration qualitative et quantitative d’une liste de données agricoles, minières, d’infrastructure, touristiques, socioéconomiques, biophysiques de base et climatiques.
Créer une fondation pour le ZES avec un véhicule de financement à usage spécial
Le véhicule de financement à vocation spéciale (Fondation des ZES) est nécessaire pour créer un environnement propice pour que les entreprises privés puissent travailler en partenariat avec le gouvernement, les banques multilatérales de développement, les organisations de développement, les organismes donateurs, les fondations, les organisations non gouvernementales et la société civile, et les organisations communautaires locales afin d’améliorer la compétitivité des ZES. , attirer des investisseurs et des fonds d’aide solides, contribuant ainsi à une croissance durable et à une prospérité partagée en RDC. Le concept de fondation des ZES s’appuie sur la prise de conscience croissante à l’échelle nationale, régionale et mondiale qu’il est urgent de réunir tous les acteurs clés ensemble afin qu’ils puissent collaborer pour améliorer la position concurrentielle des ZES et renforcer leur impact social et environnemental. La Fondation des ZES sera une entité enregistrée dotée d’une structure de gouvernance indépendante, gérée au quotidien par un secrétariat exécutif. L’objectif principal de la Fondation des ZES, qui s’articule autour de l’Initiative des ZES, est le suivant:
• Être un agent catalyseur en facilitant la collaboration par projet entre le secteur des entreprises, le gouvernement, les banques multilatérales de développement, les organisations de développement, les organismes donateurs, les fondations, les organisations non gouvernementales et de la société civile, et les organisations communautaires locales au niveau local qui contribuent aux objectifs plus larges d’une croissance durable et inclusive;
• Stimuler et faciliter l’échange de connaissances, d’expériences et d’idées entre les chefs d’entreprise, les décideurs, les régulateurs, les experts en développement, les organismes chargés de l’application de la loi et les organisations non gouvernementales en vue d’élaborer un cadre pour des réformes responsables des entreprises dans le contexte de la libéralisation et de la mondialisation;
• Fournir des services de recherche, de formation, de pratique, de renforcement des capacités, d’établissement de normes, de plaidoyer, de suivi, de reconnaissance et de soutien connexe dans le domaine de la responsabilité des parties prenantes;
• Faciliter l’aide financière ou toute autre forme d’assistance directe ou indirecte pour des activités visant à promouvoir des pratiques commerciales et de développement responsables, y compris la recherche et la formation;
• Élaborer des stratégies qui augmentent la valeur pour toutes les parties prenantes et assurent des avantages à long terme aux actionnaires et à la société dans son ensemble;
• Établir et approfondir des liens avec des organisations dans diverses parties du monde qui promeuvent les pratiques de responsabilité des parties prenantes pour l’échange d’idées et pour les actions, projets et programmes de collaboration;
• Collaborer et soutenir, directement ou indirectement, l’initiative de tout individu, groupe, organisation ou institution dans la promotion des meilleures pratiques en matière de responsabilité des parties prenantes liées aux ZES;
• Faciliter, promouvoir et collaborer aux propositions de particuliers, d’entreprises, d’associations et d’organisations liées aux ZESen vue d’un financement par des organisations nationales, internationales et multilatérales, des donateurs, des fondations, des associations industrielles et des gouvernements;
• Fournir des conseils et un soutien technique et managérial aux bénéficiaires des programmes de la Fondation par l’intermédiaire d’un réseau de conseillers issus de l’industrie et d’institutions d’excellence.
Considérations finales
Sur tout le continent, les décideurs africains sont de plus en plus conscients que la transformation économique nécessiterait à réduire les risques des investissements du secteur privé, de faciliter les liens économiques, d’assurer la diversification et la convergence des principaux actifs en temps voulu et au bon endroit. Les processus naturels ne peuvent à eux seuls garantir de tels alignements dans le temps et dans l’espace ; il doit y avoir un engagement de tous les acteurs à travers le spectre du développement (publics et privés) pour parvenir à la convergence requise des atouts et éviter les écueils du passé. Au vu des défis auxquels la RDC est confrontée, la promotion des ZES semble être un bon pas en avant pour libérer le potentiel économique du pays. Cependant, la création de ZES est une entreprise complexe et l’expérience mondiale a montré les risques et le coût d’un échec, même dans des pays plutôt relativement développés. Plus précisément, il doit y avoir un soutien politique fort et soutenu pour le développement des ZES sur la base d’une bonne conception et d’une mise en œuvre appropriée ; en particulier, la participation du secteur privé devrait être large et devrait inclure la stratégie, le développement, le financement, l’exploitation et l’administration des aspects clés de l’environnement commercial et réglementaire. Le gouvernement de la RDC ne devrait pas s’engager dans des investissements dans les ZES pour de mauvaises raisons (c’est-à-dire, intérêt personnel et prise de décision politisée), mais devrait s’assurer que le programme est pleinement aligné sur la stratégie nationale de développement et en fait partie intégrante.
Dr. John M. Ulimwengu
Chercheur principal à l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, basé à Washington, DC.
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