RDC : Gouvernement d’union nationale ? Un autre remède mou, coûteux et contre-productif du Président Tshisekedi(Tribune de Jo M. Sekimonyo)

Si l’on traitait la composition de l’équipe nationale de football avec la même légèreté que celle accordée au gouvernement, nous en serions la risée de la FIFA. Imaginez l’équipe nationale fondée sur la représentation tribale ou affiliation politique plutôt que sur le talent de chaque joueur qui est invité par le sélectionneur national ! Qu’apportera réellement l’attribution de postes comme des friandises aux adeptes de Fayulu, aux flatteurs de Katumbi, voire même à Matata Ponyo ? Rien de plus que de les faire taire en leur remplissant les poches et le ventre. En fait, c’est satisfaire les appétits voraces des gangs politiques au détriment d’une nation qui déprime chaque jour un peu plus.

Il est navrant de constater que même en temps de guerre, les acteurs politiques congolais ne cessent de vouloir creuser un trou d’accès au trésor public, s’approprier des parts du « gâteau » en usant de mille stratagèmes, à l’image de cette prétendue « union nationale » ou du simulacre de prospection du « vivre ensemble ». Ce qui est d’autant plus inquiétant, c’est que le président semble croire que cette formule serait la solution à l’occupation, par le Rwanda, de certaines zones du Nord et du Sud-Kivu.

À ce stade, il convient de se demander si le président Tshisekedi peut être perçu autrement qu’en simple politicien congolais qu’homme d’état moderne. Tout au long de son premier mandat, durant sa campagne électorale et presque jusqu’à la moitié de son second mandat, son parcours a été jalonné de remèdes qui n’ont servi qu’à masquer les véritables enjeux derrière des dribbles politiques. Malheureusement, à l’image de ses prédécesseurs, ses diagnostics et solutions, guidés par une myopie politique, occultent le fait que l’ensemble des maux de la nation, comme en témoigne la guerre à l’Est et la famine au Kasaï, résulte d’échecs constants, voire flagrants, dans la conception et la mise en œuvre des initiatives et des objectifs modernes de l’économie politique nationale, passée et présente.

Des projets tels que le récent Bukanga-Lonzo sous Joseph Kabila ainsi que le Programme de Développement local des 145 territoires (PDL-145T) de Felix Tshisekediste en sont la preuve : aucun recensement national préalable à la planification n’a été mené, et les étapes d’études de faisabilité n’ont pas été respectées dans ces deux cas.

Un gouvernement d’union nationale sera pire que celui en place, un rassemblement de guignoles, flatteurs et d’applaudisseurs, auquel s’ajouteront les râleurs et les faiseurs de chantage. Le manque de coordination et de direction ne fera qu’empirer la situation, tout comme le coût de satisfaire les égos et les illusions d’opulence que chaque membre cherchera à entretenir.

Le bon remède ? un gouvernement de crise

Les inquiétudes qui se répandent parmi la population alimentent une véritable psychose collective, renforçant l’idée que la chute du régime de Tshisekedi est désormais inévitable qu’il se rapproche de plus en plus à des souhaits. Ce phantasme se traduit par une profonde désillusion au-delà de sa capacité à remporter la guerre contre le Rwanda, une lutte qu’il semble incapable de mener à bien. Pire encore, dans l’hypothèse d’une victoire, force est de constater, pour les Congolais même au-delà de nos frontières, que celle-ci ne se traduirait en aucun bénéfice réel pour les citoyens lambda, tant ses échecs manifestes sur les plans social et économique témoignent d’une incapacité à répondre aux besoins du peuple. C’est alors que le régime doit prêter oreilles aux analyses du pourquoi la situation actuelle laisse présager qu’une victoire, loin d’apporter la transformation espérée, ne ferait qu’amplifier les frustrations d’un pays déjà ébranlé par des politiques inefficaces et une gestion défaillante des enjeux cruciaux.

Au premier plan, le gouvernement actuel apparaît comme un amalgame mêlé de trompettistes et de tambourins, prêts à mener une véritable guerre médiatique contre des Congolais qui, censures et menaces de toutes les couleurs qui violent le Constitution, ce qui profitent aux ennemis de la nation. Pendant qu’il s’acharne à étouffer tout signal d’alarme, ses membres se rangent avec toute gaieté du côté des semeurs de paniques qui enflamment la paranoïa et les instincts primitifs tel que le tribalisme et régionalisme.

Par ailleurs, les enjeux les plus cruciaux, la crise humanitaire et la crise économique, sont totalement négligés. Malgré ma pétition réclamant un budget spécial pour prendre en charge les déplacés de cette guerre, l’État congolais persiste à ignorer la crise humanitaire, alors qu’il en aurait les moyens illimités. Pire encore, aucune mesure concrète n’est prise pour endiguer une crise économique qui menace de s’aggraver. Récemment, la banque centrale a annoncé une mesure qui ressemble à une démonstration de karaté dans une unité de soins intensifs.

Il devrait donc être claire qu’il est temps de laisser place à un gouvernement de crise, composé de stratèges, et non de trompettistes, de tambourins ou, pire, de paniqueurs, dont leurs expertises sont capables de rassurer la nation. Cela ne pourra se faire que si le président brandit le drapeau du patriotisme pour faire taire quiconque oserait réclamer un nouveau partage du gâteau au lieu de lui laisser champ libre à aligner les meilleurs parmi nous là où ils doivent être. Or, le défi se complique d’autant plus que le président n’a d’ores et déjà montré aucune capacité à constituer une équipe compétente, puisque même son entourage s’est révélé dépourvu des qualités requises pour occuper leurs fonctions.

Arrêtons de nous saborder

Bon, Goma était destinée à tomber entre les mains du Rwanda et de ses marionnettes congolaises. Je l’ai affirmé haut et fort, et désormais, mes propos n’ont plus besoin d’explications. Le prétendu vainqueur se retrouve aujourd’hui dans des sales draps ; « qui perd gagne » ou l’ironie du prétendu vainqueur.

Par ailleurs, affirmer qu’ils pourront atteindre Kinshasa et remporter la guerre, comme le clament les paniqueurs et ceux qui cherchent à forcer le Président à négocier en transgressant la Constitution car ce n’est nullement de leur ressort, relève d’une parodie grotesque. L’hésitation de M23-RDF à prendre Bukavu, qui n’opposait aucune résistance, devait déjà démontrer aux Congolais que leur effectif n’est pas à la hauteur de leurs ambitions démesurées.

Par ce fait, la campagne pour galvaniser l’intégration de davantage de personnes dans l’armée est non seulement dénuée de sens, d’autant plus que nous disposons déjà d’un effectif suffisant dans nos forces armées pour neutraliser nos ennemis, mais elle laisse également entendre que ceux qui servent actuellement seraient incapables. Il est bien plus urgent de confier de nouvelles missions aux forces armées, offensive, et à la police nationale, missions qui doivent être accompagnées des ressources adéquates.

Il faut aussi dire qu’il est toxique que le régime affirme jour et nuit que notre armée est infiltrée, car de telles déclarations n’a fait qu’engendrer une paranoïa parmi ses membres et entre eux et la population. Comme dans toute guerre, il y aura toujours ceux qui refusent de croire en la nation. Les espions sont de deux côtes. Quant à la balkanisation de la RDC, elle n’est qu’un fantasme qui ne peut pas se réaliser. Ce n’est pas comprendre le Congolais. Pourtant, en la répétant sans cesse, nous risquons de la donner gout, couleur et forme dans notre conscience nationale et par se fait de la rendre plus crédible et appétissant aux yeux de ceux qui nous guettent.

Et disons que Tshisekedi démissionne aujourd’hui ? Et après ? Sama Lukonde qui est le président du Senat deviendrait président de la République. Aurait-il accompli, durant son passage en tant que Premier ministre, des exploits dont je ne suis pas informé mais qui séduiraient ceux qui demande que Tshisekedi rende le tablier ? Dans ce contexte, nombreux sont ceux qui adhèrent sans s’en rendre compte à ma proposition d’une nouvelle constitution intégrant le référendum révocatoire, permettant ainsi au peuple de destituer le président en recueillant des pétitions signées par 10 % des électeurs ayant participé aux dernières élections. Une solution qui éliminerait le besoin de recourir aux armes.

Quant à l’interview de Joseph Kabila, jugé par certains comme étant fake news qui veulent croire que le sénateur à vie est omniscient, elle a pourtant démontré qu’il n’était qu’un mortel, très imparfait, comme beaucoup comme moi le soupçonnaient. On oublie qu’il avait prédit qu’il n’y aurait pas d’élections en 2023, or celles-ci ont bien eu lieu, qu’elles soient parfaites ou non. Un diplôme ne confère ni sagesse ni intelligence supplémentaire. Par cet initiative qui s’avère inopportune sur le fond et forme, ou disons, ce trébuchement cérébrale, il s’est ainsi cloué le cercueil de son image d’infaillibilité, compromettant toute possibilité d’un retour aisé à la présidence s’il devait avoir l’audace de se représenter en 2028. Et je le lui en remercie.

Une opportunité à saisir : la guerre comme moteur de transformation nationale

En somme, le défi actuel auquel la nation est confrontée représente une opportunité en or pour une transformation politique, sociale et surtout économique. Il est impératif d’instaurer une politique économique de guerre, dotée d’un budget dédié à financer simultanément les opérations militaires, diplomatiques, et, surtout, économiques. Mais je dois insister sur les actions d’assistance humanitaire pour les déplaces d’hier, d’aujourd’hui et demain de cette guerre car je suis inondé des sollicitations d’aide sur mon compte Facebook et WhatsApp.

Mes chers compatriotes, je ne suis pas riche, financièrement. Suis-je lâche ou paresseux de n’avoir jamais intégré un gouvernement, comme certains le laissent entendre ? C’est amusant… D’une part, cette situation semble être un véritable cauchemar pour plus de personnes qu’on ne pourrait l’imaginer ; d’autre part, je n’ai jamais cherché à être important, mais utile. Au commun de mortel de décrypter le message.

Toutefois, quand on regarde le Japon et l’Allemagne, malgré leur défaite lors de la Seconde Guerre mondiale, ces nations sont parvenues à se transformer en puissances économiques mondiales. Leur réussite tient en grande partie au développement de capacités industrielles de guerre, qui ont ensuite été converties en leviers de modernisation et d’efficacité productive en temps de paix. Mais les vainqueurs comme les Etats-Unis, Ils ont su tirer parti du contexte de la guerre pour transformer leur capital humain et stimuler leur économie, devenant ainsi une référence mondiale. Toutefois, les deux camps ont triché, mais ils ont pu le faire avec suces car ils ont développé l’agilité de le faire.

 L’objectif n’est pas de souhaiter la défaite, mais de reconnaître et de saisir l’opportunité qui se présente pour transformer notre nation. Au lieu de se contenter de crier au patriotisme, il est temps d’agir avec audace et de mettre en place une stratégie globale qui conjugue puissance militaire, diplomatie, dynamisme économique et solidarité envers les plus vulnérables. Et cela demande de développer une politique économique moderne en ce sens avec une vue au-delà de cette de guerre. Autrement-dit, un changement de la Constitution avec une vue d’envol économique de la nation tout entière.

Jo M. Sekimonyo

Économiste politique, théoricien, militant des droits des humains et écrivain

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