En moins d’un an au pouvoir, l’UDPS avait mis K.O. le PPRD, allant même jusqu’à briser le pacte qui liait les membres du FCC entre eux, montrant ainsi sa maîtrise du terrain politique. Cette victoire audacieuse révèle une ruse dans un environnement où la démocratie se contente souvent d’une apparence creuse, ressemblant davantage à une foire d’empoigne qu’à un véritable espace de débat idéologique.
Pourtant, lorsque l’on passe de la tactique politicienne à la question cruciale du développement économique de la nation, la donne change radicalement. Le parti, réduit à l’unique figure de Félix Tshisekedi, apparaît comme une entité incapable de répondre efficacement aux défis qui minent la misère congolaise, s’apparentant plus à un poison lent qu’à un remède salvateur.
Il est frappant de constater à quel point cette machine politique semble ignorer la loi fondamentale, même lorsqu’elle tente de la « réviser » à tout-va. Cette attitude démontre un mépris inquiétant pour les règles qui devraient encadrer et protéger la vie démocratique de notre pays.
Prenons l’exemple de l’Article 63 de notre Constitution : « Un service militaire obligatoire peut être instauré dans les conditions fixées par la loi. » En théorie, le président n’aurait donc aucune excuse pour ne pas décréter ce service de manière immédiate, sans avoir à supplier la jeunesse de s’enrôler. La question demeure : pourquoi hésite-t-il ? Peut-être redoute-t-il de voir ses propres sympathisants, voire ses enfants, seront être pris dans ce vaste filet, ce qui pourrait devenir une manœuvre politique périlleuse.
Le bon label compte
Un groupe terroriste cherche à semer la terreur dans la population, motivé par des intérêts financiers ou une idéologie radicale. C’est précisément ce que fait l’ADF, qui opère avec une violence implacable dans la région de Beni et Butembo. Ce groupe ne se contente pas de déstabiliser les communautés locales, il s’attaque également aux infrastructures économiques. En effet, l’ADF s’efforce de contrôler les mines artisanales de la région, transformant ces ressources en un levier de financement pour ses opérations meurtrières.
Même si le M23-AFC s’efforce également de contrôler les mines artisanales de la région dans le même sens, son objectif déclaré dépasse de loin la simple ambition de semer la terreur pour des motifs financiers ou idéologiques. L’organisation affiche ouvertement sa volonté de renverser le régime de Kinshasa, ce qui la distingue nettement d’un groupe terroriste conventionnel. Plutôt que de se limiter à des actes de terreur, le M23-AFC se présente comme une force résolument déterminée à s’emparer du pouvoir par la force, transformant ainsi son discours en un véritable instrument de conquête politique. Par ce comportement, le groupe bafoue la Constitution et de ce fait commet un crime, ce qui le qualifie en toute logique de groupe criminel.
La question se pose alors : faut-il céder à la panique pour la Nation ? Est-elle réellement en danger ? En réalité, non, car les motivations affichées par cette alliance criminelle ne visent pas à fragmenter le pays ou dirai-je la « balkanisation ». Ce sont les institutions et le régime de Kinshasa qui se trouvent en péril, une situation gravement inquiétante pour eux qui méritent toute leur attention.
Toutefois, le M23-AFC représente une menace hybride.
Nanga et ses acolytes ont choisi de faire couler le sang des Congolais tout en sapant la croissance économique nationale pour s’emparer du pouvoir, à l’image des tentatives des anciens rebelles, pions des pays voisins comme Delly Sesanga et de Jean-Pierre Bemba Gombo. Ils privilégient la violence plutôt qu’une approche démocratique et refusent délibérément d’attendre les élections de 2028, animés par une ambition démesurée de remodeler le paysage politique congolais. Eh bien, a quoi bon investir des milliards pour que le pouvoir souverain désigne ses représentants, si a chaque fois après des perdants prennent l’initiative de saisir les armes et peuvent s’imposer sur nous ? Un ancien président de la CENI devrait être le premier à le comprendre.
Dans ce contexte, ils constituent un danger réel pour l’ensemble de la Nation. Malheureusement, le régime actuel a manifestement échoué à formuler des arguments dans ce sens pour mobiliser tous les Congolais contre eux.
La Constitution qu’on feint de lire
La Constitution se veut le pacte moral de la Nation, garantissant l’unité et la justice pour tous. Il est presque ironique d’entendre Nanga prêcher le fédéralisme, et donc une révision de la Constitution, alors même qu’il a rejeté mon plaidoyer à travers une lettre ouverte lui adressé de déposer les armes et de rejoindre mon initiative visant à corriger la Constitution afin d’instaurer une politique économique réellement bénéfique pour l’ensemble des Congolais. Dans ce contexte, la légitimité de réclamer un changement constitutionnel tout en brandissant des armes est clairement discutable. On pourrait presque s’imaginer une comédie tragique où l’on brandit des fusils contre ses concitoyens au lieu de plumes pour écrire l’avenir de notre pays.
Il est essentiel de lui rappeler que l’Article 64 de notre Constitution précise : « Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution. » En d’autres termes, toute démarche de réforme doit impérativement se faire dans le respect des règles démocratiques et constitutionnelles. Utiliser la violence pour imposer ses revendications ne peut qu’affaiblir le fondement même de notre pacte moral et mettre en péril l’avenir de notre Nation.
Et concernant la négociation avec le Rwanda pour qu’il cesse de perpétrer un génocide en RDC pour son gain économique ? Là, Tshisekedi en signant des accords avec Kagame avait déjà joué avec le feu d’une « haute trahison économique » à travers la lecture l’Article 63 qui stipule que « tout Congolais a le droit et le devoir sacré de défendre le pays et son intégrité territoriale face à une menace ou à une agression extérieure ».
Mais aujourd’hui, visiblement, le Rwanda ne veut plus de petits arrangements secrets comme dans la passée : à ce point il veut une capitulation ouverte, assortie d’un lourd tribut que nous serons contraints de payer. Autrement dit, le pays exige désormais des concessions claires et coûteuses, remettant en question notre capacité à négocier dans le respect de nos principes de souveraineté et d’intégrité territoriale. Cette situation met en lumière la nécessité de repenser notre stratégie pour protéger à la fois notre économie et notre sécurité nationale. Il appartient également au président Tshisekedi de veiller à ne pas franchir le seuil d’une « haute trahison économique », car un tel pas compromettrait irrémédiablement non seulement son régime et son patrimoine historique, mais surtout le développement économique de notre pays.
La ligne rouge, c’est que dès lors que le M23-AFC déclare vouloir renverser Tshisekedi, il enfreint clairement l’Article 64, alinéa 2, qui stipule que « Toute tentative de renversement du régime constitutionnel constitue une infraction imprescriptible contre la nation et l’État. » En d’autres termes, si le Président venait à négocier avec un groupe qui viole ouvertement la Constitution, il s’exposerait lui-même à une accusation de pure haute trahison.
Hélas, l’UDPS néglige ce puissant argument juridique pour contester les pressions exercées par d’autres pays en faveur de négociations avec le M23-AFC. En omettant d’utiliser ce bouclier légal, le parti aujourd’hui au pouvoir rate une occasion cruciale de défendre notre intégrité constitutionnelle face aux ingérences extérieures qui incitent à des compromis inacceptables.
Étouffer l’œuf
L’argument que le Rwanda brandit avec force est la prétendue discrimination des Tutsis congolais. Cet argument, bien que réducteur, trouve un écho favorable dans certaines chancelleries occidentales, toujours promptes à se rallier aux grandes tirades sur les minorités pour justifier et légitimer leurs positions.
Cependant, cette rhétorique, séduisante sur le papier, repose sur une simplification abusive des réalités politiques et sociales de la RDC. En se focalisant sur la question de la discrimination d’un groupe, le Rwanda détourne l’attention des enjeux véritablement stratégiques ainsi que des actes de génocide qu’il perpétue sur notre territoire. Cette focalisation sur un point sensible lui permet d’imposer son récit.
Pour contrer efficacement cette stratégie, une réponse pragmatique serait de nommer un Tutsi congolais au poste de ministre des Affaires étrangères. Ce geste, à la fois symbolique et concret, serait stratégiquement fort, car il permettrait, par la voix de ce tutsi, homme ou femme, placé dans un cadre tel que le Conseil de sécurité et les médias étrangers, d’affirmer haut et fort que les Tutsis congolais ne subissent aucune discrimination institutionnelle dans notre pays.
En adoptant une telle approche, la RDC pourrait reprendre le contrôle du discours public et désarmer les critiques. Ce faisant, le pays neutraliserait l’argument rwandais en démontrant que l’injustice prétendue n’est qu’un leurre, détournant ainsi le débat des véritables enjeux de souveraineté et d’intégrité nationale.
Cependant, je tiens à préciser que je ne considère pas cela comme la solution à la guerre, ni ne crois que le Conseil de sécurité va sauver les Congolaises. Ce n’est pas une panacée, mais plutôt une orientation stratégique. Ce que j’affirme, c’est que si nous choisissons de maintenir une approche diplomatique, il nous faudra adopter des tactiques encore plus pensées que celles du Rwanda. Autrement dit, il faudra savoir jouer plus serrer et user de moyens plus rusés pour défendre nos intérêts sur la scène internationale.
Le verre à moitié vide, ou à moitié plein ?
Entre la haute trahison économique, la confusion constitutionnelle, la peur d’instaurer le service militaire obligatoire, et un groupe armé qui s’auto-proclame renverseur de régime, le Congo navigue en eaux troubles. Pire, le régime se perd dans les initiatives de censures and des assauts médiatiques trop mal coordonnés. On a vu dans le dernier discours de Felix Tshisekedi un président qui réagit plutôt que de répondre véritablement aux défis auxquels le pays est confronté. Une fois encore, juste un politicien !
L’appel au patriotisme se révèle inutile, car les Congolais portent déjà en eux cet esprit, et l’appel à l’union, interprété comme l’obligation de suivre aveuglément le président, s’avère à la fois dangereux et antidémocratique, niant à chacun le droit fondamental de penser librement. Le régime devrait plutôt s’investir à mettre un terme à leur propre campagne apologétique qui prétend que ce n’est pas le Rwanda qui nous attaque, mais bien des pays et multinationales utilisant Kagame comme un pion, voire comme un enfant manipulable.
Perdre Goma, c’est perdre une bataille, pas la guerre. Certes, cela fait saigner le cœur, et on a de quoi être en colère ! Mais la chute de Goma a au moins secoué le monde, y compris les nôtres, et poussé tout un chacun à prendre enfin la mesure du problème. J’ai déjà affirmé, et on me l’a reproché, que Goma devait tomber pour réveiller les consciences endormies. À nos yeux blessés et larmoyants, c’était le verre à moitié vide. Mais le régime à Kigali échoue à présenter le M23-AFC comme un mouvement « libérateur » congolais. Il peine à se défaire de l’image de marionnette et de force occupante qui lui colle à la peau, c’est quand même une sacrée victoire pour la nation congolaise ! Le verre est donc bien plus qu’à moitié plein, car ceci affiche davantage la résilience du peuple congolais.
Toutefois, nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers, car le Rwanda nous impose une guerre motivée par ses propres besoins économiques, dans le but de remplir son verre. Il est impératif de revoir notre stratégie.
Plutôt que de se contenter de réflexes politiques et diplomatiques traditionnelles, nous devons mener une guerre économique et intelligente et devenir un prédateur agressif plutôt qu’une proie molle de la région. C’est en adoptant une telle posture que nous pourrons n’ont pas seulement défendre mais surtout imposer efficacement nos intérêts et caprices et contrer l’ingérence étrangère qui menace notre souveraineté.
Jo M. Sekimonyo
Économiste politique, théoricien, militant des droits des humains et écrivain
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