RDC : Ajustement du SMIG – Un poisson d’avril avant l’heure ? (Jo M. Sekimonyo)

Je me suis réveillé avec une avalanche de messages : « Ils l’ont fait !!! »

J’ai essayé de les ignorer, ayant déjà assez fait semblant de souhaiter une bonne année à amis et ennemis du fameux indicatif +243, tout en jonglant avec un deadline qui approche à grands pas. Mais mon WhatsApp congolais (et oui) a continué de biper sans relâche. J’ai donc fini par céder et vérifier pourquoi tout le monde semblait si déterminé à me narguer.

Après Bruno Tshibala, encore un « grand bond » salarial… ou un poisson d’avril avant le 1er avril ? Pour rappel, Bruno avait, le 1er janvier 2018, revalorisé le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG), le passant de 1,04 USD à 5 USD par jour pour les entreprises publiques et privées, soit l’équivalent de 7 075 FC par jour. À l’époque, on aurait presque sorti les tambours pour saluer cette audace.

Aujourd’hui, dans une mise en scène tout aussi dramatique, le ministre du Travail a annoncé tambour battant que le nouveau SMIG ajusté est désormais de 14 450 FC par jour. Une augmentation spectaculaire, non ? Mais avec un taux de change actuel à 2 874,27 FC pour 1 USD, ces 14 450 FC représentent… 5,03 USD par jour. Oui, une augmentation colossale de 0,03 USD par jour (trois centimes). Une avancée si fine qu’elle pourrait figurer dans un musée d’art contemporain ou, au minimum, dans le Guinness des records.

Dois-je rappeler que salaires et factures en RDC sont indexés sur le dollar. En résumé, ce qu’ils appellent une « hausse », c’est en réalité un dépoussiérage du SMIG, exécuté avec un chiffon troué.

Peut-on dire que Bruno Tshibala, avec son seul œil, aurait vu mieux ? Peut-être.

De mon côté, j’attends toujours que l’Assemblée nationale réponde à ma pétition. J’ai demandé un SMIG ajusté à plus de 2 USD par heure (oui, par heure, pas par jour). Pourquoi ? Pour qu’employeurs et employés voient enfin le lien direct entre productivité et récompense. Une idée révolutionnaire, semble-t-il, en RDC. Le délai pour que la commission ECOFIN réponde est de trois mois, donc dans quelques semaines. Voyons voir s’ils opteront pour le silence, au risque de violer la Constitution sur les pétitions soumises par un citoyen congolais. Suspense…

2025 démarre sur une note comique.

Rire ou pleurer ? Peut-être les deux, avant de retourner compter nos centimes.

Jo M. Sekimonyo

Économiste politique, théoricien, militant des droits de l’homme et écrivain

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